Vers une approche plus responsable des TCA


Il est essentiel de réfléchir à la manière dont certains professionnels de santé (je ne vais pas détailler) conseillent les personnes souffrant de troubles du comportement alimentaire (TCA) de ne pas diaboliser la malbouffe. Bien que l’intention derrière ce conseil soit souvent de réduire la culpabilité associée à la consommation de certains aliments qui n’en sont pas, il peut parfois se révéler contre-productif. C’est le conseil que j’ai reçu moi aussi pendant de nombreuses années.


Comprendre l’addiction alimentaire

Comparer la malbouffe à une drogue n’est pas exagéré. Pour beaucoup, la consommer de manière contrôlée est aussi difficile que pour un alcoolique de consommer de l’alcool de manière modérée. Il est crucial de reconnaître la complexité de l’addiction alimentaire.
L’impuissance face à la maladie : Les professionnels de la santé font souvent de leur mieux avec les outils à leur disposition. Cependant, reconnaître les limites de ces approches et chercher des solutions plus efficaces est essentiel pour avancer. Plutôt que de maintenir les patients dans un cycle de tentatives et d’échecs, il est temps d’explorer des traitements innovants et personnalisés.


Le cercle vicieux

Tant que l’addiction n’est pas soignée, les personnes restent enfermées dans un cycle destructeur : des efforts pour contrôler leur alimentation, des échecs inévitables, de la culpabilité, une perte d’estime de soi, et un retour aux efforts désespérés. Ce cycle de montagnes russes mène souvent à l’abandon total.
Il est également normal que le patient souffrant de TCA souhaite continuer à consommer un peu de ses anciens objets d’addiction et soit heureux d’entendre qu’il va pouvoir le faire avec la bénédiction du soignant. La personne addicte, souvent depuis toujours, ne sait même pas qu’il est possible, autant que souhaitable pour sa santé, de ne plus toucher à ces produits, sous peine d’entretenir la mémoire de l’addiction. Il sera tout au plus admis, pour continuer à vivre dans sa société, de consommer un gâteau ou un chocolat de façon exceptionnelle, pas plus d’une fois par mois. Nous n’en avons pas plus besoin que d’un verre d’alcool ou d’une cigarette. Il est tout à fait possible de trouver du plaisir dans d’autres domaines que l’alimentation et la boisson. Cependant, la facilité d’accès à ces produits, les campagnes publicitaires omniprésentes et les intérêts financiers font que la malbouffe, l’alcool et les cigarettes sont encore largement disponibles à la vente.

Déconstruire pour mieux traiter


Il est temps de déconstruire l’idée obsolète que l’addiction alimentaire est de nature psychologique, même si cela peut parfois en avoir l’apparence. Pour comprendre la véritable nature de cette addiction, il suffit d’écouter les patients. Certains ont eu des traumatismes dans leur passé, parmi eux beaucoup ont suivi des psychothérapies depuis longtemps sans résultat, et certains encore ont grandi sans problèmes, comme moi.
Ce qui distingue ceux qui peuvent gérer les épreuves de la vie autrement qu’en mangeant ou en buvant, c’est souvent l’équilibre neurochimique dans le circuit de la récompense. La santé de ce circuit, ainsi que son lien avec le microbiote intestinal, joue un rôle crucial dans la capacité à ne pas avoir de pulsions alimentaires ou d’addiction. C’est à ce niveau que nous pouvons remarquer à quel point notre civilisation moderne et la modification de notre alimentation sont en cause dans la dégradation de la santé mentale dont l’addiction fait partie.

Comment traiter l’addiction

Pour sortir de ce cercle vicieux, il est crucial de traiter l’addiction alimentaire en s’attaquant à ces problématiques neurochimiques dans le circuit de la récompense et en prenant en compte son lien avec le microbiote intestinal. Cette approche peut inclure des interventions médicamenteuses spécifiques (autres que les anti dépresseurs qui sont donnés sans résultat depuis trop longtemps) et des changements nutritionnels adaptés, avec le but premier de rétablir un microbiote en pleine santé. Il est temps que les professionnels de la santé reçoivent cette formation que j’ai obtenue en 2023, le Diplôme Universitaire Microbiote et santé, à la Sorbonne , à Paris, qui me donne la légitimité pour « soigner » notre pauvre microbiote.

Irène Lorient Naturopathe et Patiente-Experte Obésité, TCA , addiction